Depuis le Dimanche 25 Juillet 2010 à 17h54, heure à laquelle le collège des commissaires du Grand-Prix d'Allemagne a rendu son verdict dans l'affaire de la présumée consigne de course de la Scuderia Ferrari, le paddock est divisé en deux. Peu importe l'avis des observateurs, fussent-ils colorés, virulents ou faisant preuve de mansuétude ! Les analyses qui pèseront lourd dans la balance sont celles du public et des écuries.
Du public en premier lieu car la Formule 1 a ouvert un vaste chantier, celui de la reconquête de ses aficionados. Chaque coup de canif dans l'image de la F1 crée une réaction épidermique après les nombreux scandales des trois dernières années.
Des écuries car elles sont regroupées sous l'égide de la FOTA (Formula One Teams' Association, alias l'association des écuries du championnat du monde de Formule Un) et qu'elles sont au centre de la construction de l'ossature technico-sportive de la F1 du futur, en association avec la Fédération Internationale de l'Automobile (FIA). Depuis deux ans, la FOTA sonde le public pour dégager des idées forces. Le spectacle est au centre des préoccupations et ce n'est pas un hasard si la Formule Un se dotera en 2011 de plusieurs systèmes qui sont au service des dépassements : le retour du KERS, les ailerons amovibles. C'est également sur l'autel su spectacle que les aides au pilotage et les ravitaillements ont été interdits.
En ce sens, une consigne de course peut être considérée par certains acteurs majeurs du sport comme une insulte au spectacle. Une négation de la volonté du grand chapiteau de la F1 de se doter d'un Monsieur Loyal irréprochable. A plus forte raison lorsque la loi proscrit les consignes de courses depuis 2002 et l'épisode du GP d'Autriche. « Je pense que la première chose est que nous devons tous obéir aux règlementations » rappelle le directeur commercial de Mercedes GP, Nick Fry, dans les colonnes d'Autosport, « Qu'on le veuille ou non les commissaires de la FIA ont le dernier mot. Si on met ça de côté, je pense que les écuries ont une totale responsabilité vis-à-vis du spectacle. C'est le spectacle qui draine les foules et ce sont elles qui contribuent à l'arrivée de sponsors et les sponsors génèrent des partenariats qui nous permettent de faire vivre les écuries. Au final, ce sont donc les fans qui sont les clients et nous nous devons de produire un beau spectacle. »
Même son de cloche du côté de Milton Keynes où le directeur de Red Bull Racing, Christian Horner, explique « C'est vraiment dommage pour la F1 que la course ait été manipulée pour que la victoire soit offerte à une autre pilote [que celui qui l'a méritait]. Nous avons été très critiqués pour avoir laissé nos pilotes se battre à Istanbul mais je pense que c'était juste et que c'est de cette manière qu'il faut procéder » affirme Horner en prêchant pour sa paroisse, trop heureux que les feux des projecteurs se tournent vers Maranello, lui qui a dû gérer de nombreuses controverses depuis le début de la saison. « La seule perdante est la F1. Ferrari est une écurie suffisamment importante, elle ne devrait pas agir ainsi et Fernando est un pilote suffisamment bon ; il n'a pas besoin de ça à cette étape du championnat alors que plusieurs centaines de points sont à distribuer. »
Les positions officielles de Mercedes GP et de Red Bull Racing versus celle de la Scuderia Ferrari, sont de nature a poser les ferments de la discorde. La belle union des écuries a potentiellement du plomb dans l'aile et c'est pain béni pour Bernie Ecclestone qui n'aime rien de mieux que diviser pour mieux régner – la FOM (Formula One Management) de Bernie renégocie à l'heure actuelle les pourcentages des droits commerciaux versés aux écuries et toute discorde entre les écuries est une bonne nouvelle pour Ecclestone. La rixe entre écuries est d'autant plus pathétique que pas une seule des équipes de pointe n'osera affirmer qu'elle ne donnera pas de consigne de course à un moment ou à un autre du championnat. Pour preuve, les Grand-Prix du Brésil 2007 et 2008, lorsque tour à tour Massa et Räikkönen se sont effacés devant leur équipier pour favoriser sa quête du Graal. A l'époque, aucune voix ne s'est élevée pour crier au scandale... A Hockenheim, le tort de Ferrari a été de tendre le bâton pour se faire battre. La remarque de l'ingénieur de Felipe Massa, Rob Smedley, à son pilote était clair comme de l'eau de roche. « Fernando est plus rapide que toi. Peux-tu confirmer que tu as bien compris ce message ? ». En filigrane se dessine une consigne de course, confirmée par le remerciement et l'excuse de Smedley deux tours plus tard. Trop poli et trop honnête, le Brésilien s'est effacé devant Alonso.
Conscient de son rôle à la tête de la FOTA – dont il est le président honoraire jusqu'à la fin de l'année – et du danger que court la FOTA, Martin Whitmarsh, directeur général de McLaren, a judicieusement choisi de s'entretenir avec la Scuderia Ferrari sans médias interposés. « Je lui donnerai mon point de vue en privé ; je ne veux pas exprimer mon opinion en public. »
La FOTA doit éteindre le feu qui couve !
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